Il y a toujours une fenêtre.

Dans la salle de traitement, j'attends sagement que la perfusion s'écoule dans le bras de Sir Plume et je me mets en pleine conscience. Il y a du soleil derrière la fenêtre et une foison de plantes vertes dans ce grand rectangle de verdure qui illumine toutes les pièces avec fenêtres qui donnent sur lui.

Affleure à ma mémoire, ce poème qui m'a parfois aidé, oui, la Poésie sauve le monde, à traverser des moments de doute et de chagrin intense.

La nuit n'est jamais complète 
Il y a toujours puisque je le dis
Puisque je l'affirme 
Au bout du chagrin, une fenêtre ouverte
Une fenêtre éclairée
Il y a toujours un rêve qui veille
Désir à combler, faim à satisfaire
Un cœur généreux
Une main tendue, une main ouverte
Des yeux attentifs
Une vie, la vie à se partager.

La nuit de Paul Éluard

J'ai des yeux pour contempler ce qui est donné gratuitement, la lumière du soleil, le foisonnement de la vie, le camaïeu de vert qui enchanterait ma palette d'aquarelle, le mouvement de la bise qui fait danser les herbes. Là dehors, il y a de la vie.

Ici aussi il y a de la vie, goutte à goutte on repousse les limites de la mort, cinq personnes lisent, chuchotent, font des jeux de papier, on nous offre à boire, à manger, il y a beaucoup de sollicitude et d'attention pour tous ces patients. On nous raconte combien l'obtention des fauteuils fut laborieuse, trop cher a dit l'économiste du Chuv, confortables ont répliqué les infirmières, certaines perfusions dure longtemps, ceux initialement proposés sont donc utilisés en salle de prise de sang, ici on a droit au confort de chaise longue adaptable à toutes les situations inconfortables. 
Ici, les murs sont turquoise  des îles, cette couleur qui hésite entre le vert de l'espoir, le jaune de la lumière et le bleu de la nuit.

Entre blouses blanches et pas feutrés se mène un combat silencieux pour un sursis de qualité avant la mort.